Tout est une question de choix...
Dans nos séances d’audio-livres, s’il y a de grandes réussites -Ensemble, c’est tout (Anna Gavalda) ; Sur la lecture (Marcel Proust) ; Une gourmandise (Muriel Barberry)- il y a parfois aussi des bouses.
Pas seulement des ratés. De vraies, grosses bouses.
D’abord nous avons notre très cher Balzac. Celui qui n’écrivait que la nuit et toujours vêtu de sa très célèbre robe de chambre. Probablement aurait-il lavé plus souvent cette dernière, aurait-il été mieux inspiré ? A moins que ce ne soit la tranche horaire de sa pulsion créative qui le rendait plutôt soporifique... Lire du Balzac est déjà un calvaire, mais alors l’écouter par des acteurs qui font le maximum pour rendre vivant, ce qui ne l’est pas du tout, bonjour !
Qui oserait m’avouer qu’il n’a jamais sauté plusieurs chapitres d’un roman de Balzac dans l’espoir de parvenir à un tout petit peu d’action ? Allez, qu’il se dénonce et que je lui tire mon chapeau !!! Dans mon jeune âge j’ai tenté vainement de lire, à maintes reprises « Le Père Goriot ». Je n’ai jamais dépassé la description de la cuisine qui doit prendre au bas mot 25 pages. J’ai pas pu. Pourtant je suis du genre têtue... Je m’étais préparée (à plusieurs reprises), je m’étais auto-coachée pour y parvenir « Allez, hop, attrape ce fichu bouquin et essaie d’aller plus loin que la dernière fois ». De temps en temps j’avais droit à des remarques de gens plus qu’emballés par ce roman, je dois dire que je devais les regarder d’un drôle d’air. Je me disais que je devais être d’une autre planète. Une nouille. Une chiffe-molle, même pas capable d’aller au-delà de l’insurmontable… Et comme j’adore les challenges et que j’étais un rien maso, régulièrement, lorsque j’étais ado ou jeune adulte et que je passais devant ma modeste bibliothèque, mon œil invariablement se posait sur ce livre honni.
Loin de m’arrêter à cela, j’attrapais ce livre et me disais, tel un coureur avant une course déterminante : « Allez, cette fois tu vas y arriver » en entamant des exercices d’étirements. Et persuadée que cette fois, non de non, Balzac n’aurait pas ma peau, j’essayais d’entrer dans l’histoire. En général mon œil vaquait souvent ailleurs… Mon bureau était en face d'une immense baie vitrée à travers laquelle j’apercevais le patio et pratiquement toute la maison, par les baies vitrées et autres grandes fenêtres qui ornaient le mur d’en face… J’observais donc les allers/venues de mon papa cherchant ses outils à la cave, en tenue de jardin (rien que ça, c’est quelque chose), les occupations de mon petit frère dans le salon ainsi que, par les fenêtres de la cuisine, ouvertes environ d’avril à novembre (Sud de ta mère la tepu !) les gestes de ma mère et je tentais vainement de deviner ce qui nous régalerait quelques heures plus tard. Autant dire qu’à côté, Balzac… Bref, il pouvait aller renfiler son vieux peignoir !!!!!! Jusqu’au jour où j’ai mis fin au calvaire et où j’ai dû dire dans un souffle « Non, Le Père Goriot ne passera JAMAIS par moi !». Et c’en fut fait de lui. Je n’ai pas osé un autodafé mais c’est tout comme, mon œil ne s’est plus jamais posé sur lui. Bon, à ma décharge et par voie détournée, je suis parvenue à lire « La peau de chagrin » et « Eugénie Grandet » qui ont sûrement fait les frais de mes sauts de page effrénés en quête d’action ou tout du moins de quelque chose…
Mais comme ça fait super classe dans un choix d’audio-livres de mettre un peu de « grande » littérature, au hasard d’une balade au Furet, et dans nos envies si intense de partage, je me suis dit qu’il « fallait » qu’on écoute « Eugénie Grandet ». Que m’est-il passé par la tête à cette seconde ? Nul ne le sait ! Comme si d’un seul coup j’avais oublié toutes mes années de calvaire (non mais maso, je vous dis !)… Il n’y a que lorsqu’on est « obligé », je veux dire, que lorsque ça fait partie intégrante du programme de première qu’on parvient à se le cogner ! Je veux dire jusqu’au bout et sans sauter 11 chapitres sur les 15 du roman ! Non, parce qu’au moins chez Zola, ses histoires sont glauques mais les images sont belles. C’était le summum des faits divers catastrophes de l'époque ! Mais chez Balzac ? Je crois que même obligée, je ne l’aurais pas lu ! De toute façon vu la prune que j’ai pris au bac de français, peut-être que je m’en serai finalement mieux sortie avec un livre non lu, va savoir !!!!!!
Après un week-end chez mes parents, alors que nous avions 5h de route à tuer, j’ai la bonne idée de mettre mon nez sur « Eugénie Grandet ». Mue par je ne sais quelle excitation (sûrement celle associée à l’écoute d’Anna Galvada), car comment expliquer que Balzac parvienne à me faire entrer en transe rien qu’à l’idée d’un moment en sa compagnie ??? ;o), j’insère le CD dans la fente et commence alors la lecture. A la dixième page nous en étions au fronton d’une petite maison de Saumur (descriptif : environ 4 pages). Et oui, tu auras deviné, lecteur fin et perspicace : la maison de famille d’Eugénie Grandet… Avec leçon d’architecture à la clé, leçon d’histoire, de sociologie (voire ethnologie, je ne sais plus trop). Ouais bon, Honoré, t’étais pas obligé de recopier tout Universalis pour juste nous expliquer qu’il s’agissait d’une grande famille gavée de richesses agricoles. Putain… Au bout de quelques 3h30 d’écoute et à force de soupirs d’un côté comme de l’autre, on décide d’un commun accord, de couper net le blabla insipide. Environ 70 pages, et pas la moindre Eugénie à l’horizon. On connaît la vie de son père depuis les couches culottes et le premier rototo qu’il a émis entre deux soupes de navets (que la famille cultivaientt depuis 4 générations, et après un exposé tendu des 4 générations en question) mais rien sur celle qui allait finalement tenir l’histoire et mettre le lecteur en haleine. On s’est dit que s’il mettait si longtemps à accoucher c’est que bon, ça devait pas être fameux. Comme quand on baise, hein, les préliminaires, ok, mais bon quand on a envie d’un bon truc bien… Oups, je m’emporte !... Balzac…. Donc et Eugénie… Nous l’avons donc remis dans son coin et préféré écouter MichOnf pour se venger, ou Linda Lemay avant que je ne lui coupe le sifflet, je ne sais plus ;o)
Ce même jour au Furet, j’avais choisi un autre CD, qui n’était autre que le « Dracula » de Bram Stoker. Il y a des jours comme ça où on a le nez fin. Mais juste pour les bouses ! Bref. Passons parce que j’assume assez mal, en fait !
Il faut savoir que lorsque je pense « Dracula », je pense tout de suite au merveilleux film de Coppola, à Keanu Reeves et surtout Gary Oldman époustouflant et top sexy en Dracula jeune avec son accent de l’est, ses longs cheveux, son regard ténébreux et son costume gris trop mortel. Bref, je voudrais à ce sujet rendre un immense hommage à Francis Ford qui est parvenu non seulement à se cogner le livre infâme de Bram jusqu’au bout et à en ôter toutes les fadaises pour le rendre tout simplement « Wouah » quoi ! Enfin pour qui aime les films de vampires. Comme moi ! Donc, bref, toute enamourée de Gary et totalement oublieuse du roman épistolaire de notre ami irlandais que j’ai lu dans mon jeune âge en plus, donc sans excuses, tu vois le genre !
Je mets encore une fois le CD dans la fente (oui, j’adore ça, et alors ???) et espère que mon Phin sera aussi ébloui que moi par Gary. Même si c’est un bouquin qu’on écoute et pas un film qu’on regarde. Même s’il serait plus enchanté par la scène des 3 sœurs de Dracula s’acharnant sur Keanu. Où il se fait littéralement sucer par Monica Bellucci. Oui, bon, le torse, et les poignets. Mais quoi ?, un peu d’imagination, bordel !!!
Bref. Je m’égare…Mais voilà que l’écoute commence. J’avais oublié que ce roman était écrit à travers le journal intime de Mina Murray et Jonathan Harker. Le style est d'une lourdeur infâme (pire qu'une sieste après deux tonnes de mogettes) de ces deux jeunes gens est d’une simplicité triste à pleurer qui fout presque les miquettes. Perso, en lisant le premier paragraphe j’aurais arrêté d’écrire. Mais bref. Et donc, on s’écoute toute la première partie qui est déjà longue, longue, longue, pire que la traversée du Plateau de Langres en plein hiver…. On attaque la seconde partie et là… Une misère…
Je pense que Bram était clairement misogyne parce que pour arriver à créer des personnages féminins aussi sots, fallait que ça sorte forcément de la tête d’un mec du XIXème. A mon avis, et sans vouloir faire de délation outre mesure, les blagues sur les blondes pourraient tout à fait venir de lui... Faudrait vérifier cela. Ses nanas, donc, sont bêtes à pleurer. Les pauvres filles qui dorment d’un sommeil du juste parce que de la journée, elles ont du faire une promenade de 2 kil… Attends Mina, viens faire mes journées s’il te plaît… Bref, nous avons tenu encore un bon bout, en nous disant que ça allait se réveiller et devenir un peu plus punchy. Mais nous avons rendu les armes devant les nunucheries que s’échangeaient Lucy et Mina.
Dracula 1, Taz&Phi 0.
Autant dire que si je voulais revoir Dracula avec mon Amoureux, c’est mort… ;o)))…
(Boah, avec un petit extrait de la scène hot, ça marchera peut-être !!!!)… Pour la persuasion, tout est une question d'argument(s)...
Tout ça pour dire quoi ? Pour dire simplement qu’il suffit de choisir les audio-livres comme on choisit ses livres et non comme on choisit un film. Les acteurs ne font pas tout. Un livre nul, lent ou mal écrit, reste nul, lent et mal écrit, même lu par des gens dont c’est le métier.
Dire qu’il m’a fallu tant de bouses pour comprendre ça !
(Mina, sors de ce corps, Merci !)
Tazounette